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UNPI 82 - Montauban
Chambre Syndicale de la Propriété Immobilière Occitanie

Fiche actualité fédération

Les modalités de l'obligation de débroussaillement

DÉCRYPTAGE - Le changement climatique et l'intensification des phénomènes de sècheresse augmentent le risque incendie. Des « méga-feux » ont frappé la France en 2022. Au total, la surface brûlée (forêts, cultures et espaces naturels) a représenté 72 000 hectares, occasionnée par 19 711 incendies. En réaction, la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 a été promulguée afin de mettre en place une stratégie nationale de défense des forêts et des surfaces non boisées contre les incendies.

Par Nathalie Quiblier, journaliste

 

De cette loi, découle notamment le renforcement de l'Obligation légale de débroussaillement (OLD). Mesure essentielle de lutte contre les incendies, le débroussaillement correspond aux « opérations de réduction des combustibles végétaux de toute nature dans le but de diminuer l'intensité et de limiter la propagation des incendies » (article L. 131-10 du Code forestier). Dans certaines régions, les propriétaires immobiliers ont l'obligation légale de débroussailler afin de limiter la propagation des incendies et de diminuer leur puissance tout en facilitant l’intervention des sapeurs-pompiers et ainsi de protéger leurs constructions et celles aux alentours.

Le gouvernement a lancé en octobre 2024 une grande campagne de sensibilisation afin de rappeler l'importance du débroussaillement, son obligation, ainsi que les différentes sanctions qu'encourt le contrevenant.

 

Que signifie « débroussailler » ?

Dans sa communication du 15 octobre 2024, le Gouvernement définit le débroussaillement : « Le débroussaillement n'est ni une coupe rase, ni un défrichement. Il correspond à plusieurs types de travaux : des travaux de réduction forte de la végétation qui peuvent nécessiter la coupe d'arbres ou d'arbustes, l'entretien d'une zone ayant déjà fait l'objet d'un premier débroussaillement, qui consiste dans ce cas à maintenir une faible masse de végétation au sol en coupant les herbes et la broussaille »[1].

En vue de la protection collective, il faut débroussailler aux abords des habitations et des voies de transport, ainsi que jeter les déchets végétaux et éloigner tout ce qui peut prendre feu aux alentours de l’habitation (comme les tas de bûches).

Débroussailler est obligatoire dans les territoires classés à risque d'incendie de forêt. Dans chaque département ou massif concerné par une obligation de débroussailler, un arrêté préfectoral précise les modalités de débroussaillement applicables. Un arrêté ministériel du 29 mars 2024 définit le socle des types de travaux que doivent contenir les arrêtés préfectoraux arrêtant les modalités de mise en œuvre du débroussaillement : coupe ou broyage de la végétation herbacée et ligneuse basse et des arbustes situés sous le couvert d'arbres, élagage des arbres et arbustes afin qu'aucune branche ne retombe près du sol, élimination par broyage ou par exportation de l'ensemble des rémanents et produits végétaux issus du débroussaillement, etc. À ce socle, le préfet peut ajouter des prescriptions complémentaires (coupe d'arbres par exemple) ou dérogatoires (maintien de plantes, d'arbres ou de haies à proximité des maisons, etc.). Il peut aussi prescrire des mesures qui permettent de tenir compte d'enjeux locaux spécifiques.

 

L'obligation de débroussailler son terrain

La loi du 10 juillet 2023 prévoit que les territoires où le débroussaillement s'applique seront désormais fixés par un arrêté interministériel. Le dernier arrêté classant les bois et forêts exposés au risque d'incendie a été publié le 6 février 2024. Par cet arrêté, 43 départements sont concernés ; toutefois, toutes les communes de ces départements ne sont pas classées en zone d'obligation légale de débroussaillement.

L'obligation de débroussaillement ne s'applique pas uniformément à tous les territoires. Elle concerne spécifiquement les zones exposées aux incendies de forêt et de végétation, c'est-à-dire dans les départements à risque, mais également dans les zones identifiées comme telles par le préfet.

 

À noter : pour savoir si vous êtes concerné par cette obligation de débroussaillement, vous pouvez contacter la mairie, la préfecture ou consulter la plateforme Géoportail. En effet, l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) a mis en ligne sur son Géoportail, le zonage informatif des OLD correspondant à une carte en ligne afin que tout citoyen puisse localiser son terrain et savoir s’il est soumis à la réglementation sur le débroussaillement obligatoire : www.geoportail.gouv.fr/donnees/debroussaillement.

 

Dans les territoires classés à risque d'incendie, le débroussaillement et le maintien en état débroussaillé sont obligatoires sur les zones situées à moins de 200 mètres des bois, forêts, landes, maquis ou garrigues (article L134-6 du Code forestier) et particulièrement :

  • Hors zone urbaine :

- aux abords des habitations, constructions, chantiers et installations de toute nature sur une profondeur de 50 mètres autour de ces habitations, constructions, chantiers et installations de toute nature. Le maire de la commune ou le préfet peut porter cette obligation à 100 mètres selon les risques locaux ;

- aux abords des voies privées (route, sentier, chemin privatif) donnant accès à ces habitations, constructions, chantiers et installations de toute nature, sur une profondeur fixée par le préfet dans une limite maximale de 10 mètres de part et d'autre de la voie. 
 

Il n’y a donc pas d’obligation de débroussaillement pour le propriétaire d’un terrain non bâti hors zone urbaine.

 

  • En zone urbaine (classée U par le plan local d'urbanisme) : toute parcelle, construite ou non doit être intégralement débroussaillée. En présence d'une habitation, le propriétaire doit débroussailler les espaces situés à moins de 50 mètres de son habitation si ceux-ci se situent en zone non urbaine.

 

Il est important de rappeler que l'obligation de débroussaillement pèse sur le propriétaire du bien. Le locataire peut débroussailler si le propriétaire le stipule dans son contrat de location. Mais seul le propriétaire des constructions, chantiers et installations de toute nature (ou propriétaire du terrain dans les zones urbaines) est responsable légalement. La seule exception concerne les baux emphytéotiques dans lesquels, en principe, les bénéficiaires récupèrent les charges du propriétaire, notamment celle du débroussaillement.

 

L'obligation de débroussailler le terrain de son voisin

C’est bien le propriétaire de l'habitation concernée qui doit s’occuper du débroussaillage de son terrain. Toutefois, si la bande des 50 (ou 100) mètres empiète sur le terrain d'un voisin, ce dernier n'a pas à prendre en charge les travaux, dès lors que son terrain ne supporte aucune construction ou installation et n’est pas situé en zone urbaine (c'est-à-dire dans le cas où il n'est pas lui-même soumis à l'obligation de débroussaillement).

L’OLD à laquelle est tenue le propriétaire de l'habitation peut donc porter sur des terrains qui ne lui appartiennent pas et que le code forestier désigne sous le terme de « fonds voisins ».  

 

Le propriétaire voisin ne peut pas s'opposer au débroussaillement de son terrain, mais il faut obtenir son autorisation pour y pénétrer.

Ainsi, pour intervenir au-delà de sa parcelle, c'est-à-dire intervenir sur une parcelle qui appartient à un voisin, pour respecter la zone des 50 mètres, il faut préalablement informer ce voisin, de préférence par lettre recommandée avec accusé de réception.

Un modèle de courrier dénommé « Modèle de lettre à l'usage des propriétaires devant débroussailler chez leurs voisins » est téléchargeable sur le site Service-Public.fr[2].

À la fin du délai d'un mois à compter de la notification de demande d'accès, soit le voisin donne son accord et rien ne s'oppose alors au débroussaillement, soit il refuse. Dans le cas d’un refus, le voisin peut choisir d'effectuer lui-même le débroussaillement ou il peut choisir de ne pas effectuer le débroussaillement et refuser l'accès. En cas de refus total ou de silence (absence de réponse) du voisin, la responsabilité du débroussaillement lui incombera en totalité. Face à cette attitude, le propriétaire à qui incombe l'obligation de débroussailler doit en informer le maire. Ce dernier peut mettre le voisin récalcitrant en demeure de s’exécuter.

L'autorisation de pénétrer sur le fonds voisin est réputée donnée pour trois ans. Celui qui l’a accordée peut toutefois la révoquer, selon des modalités permettant de conférer date certaine à cette révocation. À partir du moment où l’autorisation est révoquée, le propriétaire du fonds voisin doit assurer lui-même les obligations de débroussaillement.

En cas de superposition d'obligations de débroussailler sur une même parcelle, la mise en œuvre de l'obligation incombe en priorité au propriétaire de la zone de superposition[3].

 

L'intervention possible des personnes publiques

Le législateur crée une procédure d’accord simplifié afin que les collectivités et leurs groupements réalisent des travaux de débroussaillement avec l’accord écrit ou tacite des propriétaires.

Les personnes publiques qui prennent l’initiative de mettre en œuvre ces actions de débroussaillement doivent procéder à la notification du propriétaire du fonds ou, lorsque le propriétaire n’est pas identifié, à l’affichage en mairie un mois au moins avant le début de la période prévue pour la réalisation de l’action de débroussaillement.

Il est possible, pour le propriétaire, d'accepter ou de refuser par écrit cette action dans un délai d'un mois à compter de la notification ou du début de l'affichage. En cas de refus, le propriétaire conserve la charge du débroussaillement ou du maintien en l'état débroussaillé.

À défaut de réponse à l'issue d’un délai d'un mois, l’accord sera réputé acquis.

Les personnes publiques se font ensuite rembourser par les propriétaires concernés les frais de travaux et les frais annexes associés à la prise en charge des actions de débroussaillement et de maintien en état débroussaillé.

Avec cette procédure d'accord simplifié, il s’agit de garantir la continuité des travaux, notamment lorsque les propriétaires ou les occupants du fonds voisin ne sont pas identifiés ou ne répondent pas à la demande.

 

L'obligation d'informer les acquéreurs et les locataires

Depuis le 1er janvier 2025, les propriétaires de terrains, dans les régions concernées par l’obligation légale de débroussaillement, doivent informer les acquéreurs et preneurs à bail de l'existence de cette obligation. En pratique, l'information de l'obligation de débroussaillement est communiquée dans l'annonce immobilière et intégrée à l'État des risques et pollutions (ERP). Obligatoire, cet ERP informe le futur acquéreur ou locataire des risques (naturels, miniers...) auxquels il peut s'exposer en habitant le logement.

L'ERP doit être remis au locataire, lors de la première visite (et annexé au bail), ainsi qu'à l’acquéreur, lors de la première visite (et annexé à la promesse de vente, à l'acte de vente ou au contrat préliminaire en cas de vente en l'état futur d'achèvement). De plus, le vendeur doit également annexer une attestation sur l’honneur de la réalisation du débroussaillement ou de son maintien en l’état de débroussaillement afin de certifier qu'il a bien respecté les prescriptions légales et réglementaires en la matière.

Le vendeur ou le bailleur doit enfin transmettre à l'acquéreur ou au locataire la fiche d’information sur les obligations de débroussaillement téléchargeable sur le site georisques.gouv.fr.

 

Contrôles et sanctions en cas de non-respect de l'obligation de débroussaillement

C'est le maire qui est responsable du contrôle de l'OLD et de son exécution. Il peut être aidé par les agents assermentés, notamment ceux de l’Office national des forêts (ONF), habilités à verbaliser. Ils ont accès aux propriétés privées, à l'exclusion des locaux à usage de domicile et de leurs dépendances bâties.

Si le propriétaire est absent au moment du contrôle, une notification est laissée sur place ou envoyée par lettre recommandée avec avis de réception. Elle fixe un délai dans lequel un nouveau contrôle sera effectué. Si le propriétaire est inconnu, la notification sera affichée à la mairie ; et s'il refuse l'accès à sa propriété, le juge pourra lui ordonner d'obtempérer.

 

Avant tout, la personne qui n'a pas débroussaillé risque la mise en danger des personnes vivant dans l'habitation non débroussaillée, la destruction de son habitation par le feu et de tous les biens qui sont à l’intérieur. L'ONF précise que 90% des habitations débroussaillées ne subissent aucun dégât lors des grands feux.

En cas de non-respect de l'obligation légale de débroussaillement, le maire (le cas échéant le préfet) peut mettre en demeure la personne tenue à l’obligation de débroussailler d’exécuter les travaux de débroussaillement ou de maintien en état débroussaillé dans un délai qu’il fixe. Lorsque cette personne n'a pas procédé aux travaux prescrits par la mise en demeure à l'expiration du délai fixé, elle encourt une amende administrative dont le montant ne peut excéder 50 euros par mètre carré soumis à l'obligation de débroussaillement.

Le maire peut également exécuter d'office les travaux de débroussaillement, aux frais du contrevenant.

Le contrevenant est également passible, à l'expiration du délai fixé, de poursuites devant le tribunal correctionnel et peut être condamné au paiement d'une amende pénale de 50 euros par mètre carré soumis à l'obligation de débroussaillement. Le juge peut enfin assortir son injonction de respecter l'obligation d’une astreinte qui ne peut être inférieure à 50 euros et supérieure à 100 euros par jour de retard et par hectare soumis à l'obligation légale de débroussaillement.

De plus, le non-respect de l’ensemble des obligations légales de débroussaillement constituant une contravention de 5e classe, le contrevenant, personne physique, risque une amende de 1.500 euros.

Pour finir, au niveau de l'assurance, en plus de la franchise contractuelle, une franchise supplémentaire de 5 000 euros peut être réclamée à l'assuré en cas de dommages suite à un feu de forêt s'il ne s’est pas conformé à l’obligation de débroussaillement.

 


[1] www.ecologie.gouv.fr, rubrique presse

[3] Cf. la fiche d’information sur les obligations de débroussaillement (page 3) https://files.georisques.fr/ial/Fiche_OLD.pdf